D’accord, les arbres ne sont pas d’un abord facile : si l’on essaie de s’y adosser, la nuque fait souvent un angle inconfortable, la tête peine à trouver sa place, et on comprend vite qu’il faut s’y prendre autrement.
Les étreindre, c’est souvent une opération ardue, voire ingrate. Y grimper ? Seulement s’ils consentent des basses branches.
On met longtemps à accéder à la vraie question, celle du rythme.
Celui qui rassemble toute sa patience, toute sa lenteur, fait encore preuve d’une précipitation qui interdit le rapprochement.
Il faudrait compter en saisons et non en instants, gagner une hauteur de vue, un enracinement véritablement inhumains.
Si l’on tente de respirer à leur rythme, on risque l’asphyxie ; les bras peinent à garder la pose et au bout des doigts, si rarement des fruits…
Hélas, l’érection prolongée devient vite douloureuse.
Sans doute devrait-on d’abord être berger d’animaux horizontaux pour une décennie, appuyé sur un bâton, puis sentinelle sur une frontière abandonnée pendant un siècle, pour s’y préparer.
Et puis peut-être encore mime, mais mime économe de gestes, au point d’être presque immobile, pour un public absent et puis encore veilleur de nuit, qu’il pleuve ou qu’il vente, juste quelques siècles.
Et penser écorce, et penser aubier, penser bois, jusqu’à faire souche.