Encore une fois, personne ne l’a demandé, et je n’ai probablement pas le droit de le faire, mais après avoir lu et écouté Sara Borjas, je n’ai pas résisté à l’envie de traduire « Lies I tell ». Sara Borjas vient de publier son premier recueil, Heart like a Window, Mouth like a Cliff.
Les femmes ont une fenêtre sur le visage : c’est vrai. Je ressemble à ma mère : c’est vrai. Je tiens à vous dire que je ne suis pas comme elle : c’est vrai. J’ai honte de marcher dans un corps de femme : c’est vrai. Je voudrais retirer tout ce que je dis : c’est vrai. Une fenêtre est quelquefois un miroir. Elle peut aussi être une porte : c’est vrai. Quand elle était une petite fille, ma mère dormait dans une cahute sans fenêtres avec une seule porte : c’est vrai. Ma grand-mère claquait les fenêtres : vrai. Les mains d’une mère sont plus fortes que Dieu : vrai. On utilise souvent des fruits pour décrire une meurtrissure; un coup, prune ou châtaigne : vrai. Les fenêtres de ma mère châtaignées : vrai. La porte de ma mère pêchée : vrai. Elle aime le goût des pêches : c’est vrai. Mon père ne supportait pas qu’il y en ait dans la maison : c’est vrai. Il y avait trois portes et neuf fenêtres à notre maison : c’est vrai. Les femmes ont un visage à la fenêtre : vrai. Les pères ont une fenêtre, mais je ne sais où elle se trouve : vrai. Ce qui mine, c’est le duvet de la pêche, a-t-il dit : c’est vrai. Je n’ai jamais approché une pêche d’assez près pour pouvoir la manger : vrai. La peau se souvient des pires expériences : vrai. Je n’aime pas qu’il me manque quelque chose : vrai. Mon père a une porte mais je ne peux la trouver : vrai. Certaines fenêtres ne s’ouvrent pas : c’est vrai. Un soir j’ai vu mon père pleurer dans la cour, la tête dans les mains : c’est vrai. J’invente les choses dont j’ai besoin : c’est vrai.