Cahin-caha, continuant à me mêler de ce qui ne me regarde pas, poursuivant mon chemin parmi les poétesses amérindiennes, j’ai traduit ce poème tiré de National Monuments, de Heid Erdrich, dont on peut lire la version originale, « Ghost Prisoner » sur le site Poetry Foundation. Née en 1963, Heid Erdrich est ojibwé.
Ce prisonnier et d’autres « détenus fantômes » étaient cachés, principalement pour empêcher que le comité international de la Croix Rouge puisse surveiller la manière dont ils étaient traités, ont avoué des responsables.
— « Rumsfeld a ordonné que des suspects irakiens soient détenus comme « prisonniers fantômes » », San Francisco Chronicle, 17 juin 2004.
Prisonnier fantôme, meurtrier
il souhaiterait être invisible, pur courant d’air
déjà mort. Son lit étroit le déverse
au loin, il rêve qu’il s’évade
par les saintes brèches qui s’ouvrent
dans le sourire de son jeune fils.
Les dents tombées lui offrent
une liberté si absurde
qu’il s’éveille et qu’il rit.
Personne n’entend le prisonnier fantôme
qu’il geigne ou qu’il supporte stoïquement
les instruments que nous payons
pour jouer une marche à la liberté
si absurde que nous nous réveillons
et hochons silencieusement la tête.
Nous ne disons pas de mal d’un mort.
Prisonnier fantôme, toujours meurtrier
il souhaiterait être visible, flamme aérienne
et rallier les morts. Dans sa cellule étroite
seulement la place de prier. Sainte, sainte
vengeance d’un fantôme expulsée par les brèches
de sa propre bouche martyrisée, malédiction
si absurde qu’il s’éveille à son hurlement.
Personne ne dit son nom, ses crimes
ou le nombre de séances de choc qu’il a fallu
pour le ressusciter, en faire un délateur d’insurrection
le coût de la ronde de la liberté.
Nous refusons de savoir ce qu’il a fallu faire.
Le mal du mort, nous évitons de le dire.
Nous refusons de savoir ce qu’il a fallu faire
pour qu’il souhaite être raide mort.