Tilleul n’es-tu
qu’arbre de cour d’école
de jardin public
facile à tailler
souvent mutilé
familier et vaguement ennuyeux ?
N’es-tu que bois blanc,
sans fermeté
un nom un peu mouillé
quelques samares
à l’automne dispersées ?
Si le café me convient
davantage
que l’infusion
cependant
la tasse de tisane
du petit Marcel
chez l’aïeule
me bouleverse quand
la fleur se recrée
l’espace d’un instant
déployant la splendeur printanière
d’un juin défunt
Tempête sentimentale
dans une tasse
et Marcel oublie le linceul
Et vraiment qui s’est tenu
sous la ferveur
parfumée
d’un tilleul en fleur
bourdonnant de promesses
de miel blond
oublie le linceul
En outre
l’ami Olivier de Serres
auteur au seizième siècle
du Théâtre de l’agriculture
et Ménage des champs
qui l’appelle « tillet »
m’apprend
qu’en récoltant
rouissant
battant
son écorce
on peut obtenir
un tissu
« très grossier
comme pour servir en
voiles de moulin à vent »
Et notre fantaisie
à moi et au tilleul
alors prend l’air et le vent
et j’oublie le linceul