Effeuillage ?
Qui nous défeuille
nous effeuille
le paysage
à la saison d’effeuillaison
à la saison de l’effeuillement
signant le passage du temps ?
Le langage est un arbre
pluie de suffixes
se détache des branches
Limbes
nervures
pétioles
s’envolent
Et la stipule
remarquée par Lamarck ?
Après le passage des fleurs
aux fruits
le moment automnal
est-il essentiellement
mélancolique ?
Saturation d’été
de sécheresse
Excès de maturité
Autour du pivot
d’un équinoxe
d’une égale nuit
sans équivoque
Danseuses, volantes
bien sûr, coureuses
amies du vent
de l’arbre, les effeuilleuses
strip-teaseuses
Robes cardinalices
vêtures d’or
haillons ajourés
de la saison aboutie
Comme les feuilles serait
caduc, le vieux monde
caducs nos espoirs
caduques nos existences ?
Aux murs de jadis
tableaux naïfs
de feuilles mortes
sous plaque de verre
et papier gommé
d’automnes enfuis
Feuilles détachées
avec soin choisies
dans les allées
du parc Montsouris
par les enfants
avec notre grand-mère Françoise
et j’apprendrais plus tard
que le surnom « Mamie »
venait de m’amie
dame d’antan
mon amie
Effeuillement
effeuillage
il y a toujours un geste
il y a toujours un labeur
d’enlever les feuilles
pour exposer les fruits
à davantage de soleil
Courir, voyager
danser la ronde
voler enfin
au risque de tomber
et de tapisser
le creux d’un chemin
le jeu en vaut
la chandelle
Semer des feuilles
sèches
des feuillets
crissants
au hasard des librairies
des bibliothèques
des lectures
effeuillaison
Et puis me dit le dictionnaire
plus gaillard que triste
« Voir la feuille à l’envers »
signifiait naguère
« s’adonner aux ébats
amoureux dans les bois »