Habituellement, passent en rang assez serré
chantent leur petite musique
récitent leur litanie
font trois petits tours et puis s’en vont
On les croirait jumelles
mais chacune, une légère altération
un changement de lumière
de coloration, d’humeur
Scintillent et s’éteignent
dansent au-dessus du gouffre
tombent pile ou de travers
Mystère parent de celui de la musique
qui existe dans l’instant de sa disparition
Il en est des blondes, des brunes
on serait tenté de les étreindre
de les retenir, de les embrasser
mais pas plus que le sable dans le sablier
On imagine les collectionner
les épingler dans des boîtes
avec des étiquettes
les momifier
en faire des amulettes
en faire un collier
les distiller et les boire
les fumer
les observer au microscope
mais pas plus que l’eau vive
S’égrènent et se sèment
s’éparpillent, se dissipent
comme une poignée de fétus
Goutes de graisse d’agneau
qui tombent sur la braise
et brûlent et grésillent
Information de dernière minute
on nous a fait croire
que la maison, l’arbre, le roc
étaient construit de particules
faux, ils sont construits
en minutes
Information de dernière minute
cocottes minute
bombe minute
minute d’attente
minute de détente
Tant de minutes de vie en moins
Celle où je t’ai vue pour la première fois
celle où tu as répondu « oui » à la question que j’ai posée
Larmes, graines, flocons
volètent, papillons
disparaissent
pour une longue saison
Tendent à se raréfier
à devenir irrespirables
minute d’angoisse
Minutie
minute de battement
minute de répit
minute suprême
Dernière minute
Je vous secoue, je vous éparpille
gouttes de pluie importunes
je vous lance comme des dés
sur une table à jouer
vain geste de révolte
Dernière minute
pourquoi mesurons-nous le temps
à l’aune d’un obscur calcul céleste
alors que nos palpitations internes
donnent le rythme ?
Et je me tiens en marge
à un battement de cœur de vous