Je devrais plutôt tailler
des signes abstraits
dans un roc isolé
M’appelle pourtant
un nouvel éloge
nouvelle réclamation
nouvelle acclamation
nouvelle proclamation
d’un arbuste tenace
confus et épineux
Comme moi ?
Feuillage vert sombre
aux nervures convergentes
baies noires à la fin de l’été
toxiques et purgatives
Avec la bourdaine
et le cornouiller
on le confondrait
sans ses épines
Rhamnus catharticus
On en a fait des haies
des boules
sans doute faute de buis
car du bas il se dégarnit
on l’a planté aux bosquets d’été
des grands parcs
Bois-noir
bourguépine, noirprun
ou encore nerprun
dissimule des secrets
dans son ombre
Dans l’épaisseur
du buisson, épine-de-cerf
spina cervina, buckthorn
on croit deviner un cervidé
cerf, daim ou chevreuil
diable ou divinité cornue
L’antique Cernunnos ?
Pour chasser tous les maléfices
des ensorceleurs et enchanteurs
le vieux Grec Dioscoride
conseillait de mettre ses branches
aux portes et fenêtres
Son bois ,dit-on, tors et court
rouge flammé de jaune
sied aux petits objets
Ses fleurs de « nulle apparence »
vertes et petites
attirent pourtant une floraison
de papillons
dont le jaune citron
aux ailles délicatement dessinées
en forme de feuille
l’azuré des nerpruns
le satyre du prunellier
Ses baies broyées
mêlées à de l’alun ou de la chaux
séchées dans une vessie
accrochée dans la cheminée
produisent un très beau vert
pour peindre les ombres des lointains
ou aquareller nos rêves
de forêt